Rencontres inspirantes
Outre les trois résolutions adoptées par la 11e Conférence des femmes d’Unia, des ateliers ont été mis sur pied le samedi, en vue de préparer la mobilisation pour la grève féministe de 2023 et d’envisager la concrétisation de la charte des femmes de l’Union syndicale suisse pour un syndicalisme féministe. Nouveauté, les ateliers ont été en partie organisés et animés par les membres, avec ou sans la participation des secrétaires syndicales. Les thèmes étaient les bas salaires et la revalorisation des métiers féminins, le racisme et les discriminations au travail, le dumping salarial et l’exploitation des migrantes et des frontalières, et la féminisation des syndicats.
Le jour d’avant, une table ronde sur les discriminations multiples a réuni des femmes en lutte dans différents secteurs et pays afin qu’elles partagent leurs expériences avec les femmes d’Unia. Il y avait des militantes du collectif tessinois Badanti, des aides familiales qui luttent pour leurs droits malgré des conditions de travail très précaires, des femmes de chambre de l’hôtel Ibis Batignolles à Paris qui ont mené une grève durant de nombreux mois et en sont sorties victorieuses, et enfin des travailleuses frontalières de l’industrie Riri dans le Tessin qui ont mené il y a quelques semaines une grève exemplaire. «Ces cas concrets montrent que les femmes peuvent s’organiser, lutter et gagner! C’est une belle inspiration pour la grève féministe à venir», conclut Aude Spang.
Pour la partie festive de cette rencontre sur deux jours, les participantes ont eu droit à une performance de Drag King, une forme de spectacle issue de la communauté LGBTIQ+ où une femme sur scène, à travers une apparence typiquement masculine, satirise les comportements machistes et joue avec les stéréotypes de genre. Le groupe Verso Sud, d’Italie méridionale, a ensuite pris le relai pour la partie musicale.
Moment de cohésion et de sororité
En l’absence d'Eleonora Failla, présidente de la Commission femmes, Angelica Sorrentino, vice-présidente de la section Sopraceneri, Unia Tessin et Moesa, a assuré la présidence de la conférence. Retour sur ces deux jours intenses
Comment avez-vous vécu cette conférence?
L’ambiance était formidable! C’est comme si nous avions besoin d’être ensemble, de nous retrouver. Ce n’est pas la première conférence à laquelle je participe, mais j’ai vraiment senti l’union entre nous, comme si nous étions toutes des sœurs. On dit souvent que les femmes entre elles ont du mal à se mettre d’accord, eh bien, c’était tout le contraire: j’ai rarement ressenti une telle cohésion.
Sur la forme, c’était aussi fantastique, car les militantes étaient les protagonistes de cette conférence. Nous avons eu la parole tout du long, nous avons écouté les histoires de chacune, et c’était très satisfaisant. Nous sommes parties motivées comme jamais, déterminées à aller de l’avant!
Qu’avez-vous retenu des ateliers et des discussions?
Les grévistes nous ont livré des témoignages poignants qui montrent que, malheureusement, en 2022, les femmes sont encore maltraitées et insultées sur leur lieu de travail, et c’est inacceptable. Des moments si forts que nous avons vécu leur histoire comme si c’était la nôtre, c’était très émouvant. D’ailleurs, quand elles sont parties, elles ont dit qu’on leur avait redonné de la force pour continuer la lutte.
De la même manière, nos consœurs syndicalistes venues d’Allemagne et d’Autriche nous ont rapporté les problématiques que rencontraient les femmes au travail dans leur pays, et on se rend compte que les problèmes se répètent, ici et ailleurs. Les femmes ne sont pas appréciées à leur juste valeur et, pourtant, leur rôle est crucial dans nos sociétés. Il est urgent que les femmes obtiennent le respect qu’elles méritent!
Pourquoi est-il capital que les femmes se mobilisent?
Le 14 juin 2019, nous avons envoyé un signal très fort, et nous avons été largement soutenues par les hommes. Quelle est la réponse du Conseil fédéral? Une augmentation de l’âge de la retraite des femmes alors qu’elles sont toujours sous-payées et ont des rentes de misère. Rien n’a changé! AVS 21 est une réforme alibi, mais tout le monde sait que la Suisse a les ressources suffisantes pour financer les retraites, c’est juste une question de volonté politique.
Pour les femmes d’Unia, passer le relai aux jeunes sur le marché du travail et corriger les inégalités salariales seraient déjà un pas vers l’augmentation des cotisations AVS.
Nous avons pris la décision de faire une grande grève en 2023, mais notre message est clair: la mobilisation ne commence pas, et ne se termine pas, le 14 juin: nous devons agir dès maintenant pour enfin changer les choses.