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Libye: l’enfer de la détention des migrants

Migrants secourus en mer.
© Flavio Gasperini/SOS Méditerranée

Depuis le 1er janvier, SOS Méditerranée a secouru 1916 rescapés.

Amnesty International dénonce les effroyables conditions de détention des migrants en Lybie et le rôle honteux de l’Europe dans les renvois forcés

Torture, violences sexuelles, travail forcé et autres formes d’exploitation systématique et en toute impunité: à la mi-juillet, Amnesty International a publié un nouveau rapport sur la détention abusive de réfugiés et de migrants débarqués en Libye et les violations multiples commises à leur égard depuis une décennie. Des actes qui se perpétuent, bénéficiant de la légitimité, depuis la fin de l’année 2020, de la Direction de la lutte contre la migration illégale (DCIM) – rattachée au Ministère de l’intérieur – qui a intégré en son sein deux nouveaux centres de détention de triste réputation. Des espaces aux mains de milices connues pour les mauvais traitements infligés et les disparitions forcées. Des personnes y ayant survécu ont raconté, rapporte en substance l’ONG, que les gardiens violaient les femmes et les soumettaient à d’autres contraintes sexuelles en échange de nourriture ou de leur libération. «Ce rapport terrifiant jette un nouveau coup de projecteur sur la souffrance des personnes interceptées en mer et renvoyées en Libye», commente, dans un récent communiqué de presse, Alexandra Karla, directrice d’Amnesty International Suisse. Selon l’ONG, des individus raisonnablement soupçonnés de figurer parmi les abuseurs ont décroché des postes de pouvoir ou des promotions, «ce qui signifie que nous risquons de voir les mêmes horreurs se reproduire encore et encore». L’enquête jette aussi une lumière crue sur la complicité persistante des Etats européens, continuant d’aider les gardes-côtes libyens à arrêter les migrants et à les renvoyer de force «dans l’enfer de la détention en Libye». Si, souligne l’ONG, les autorités de Tripoli se sont engagées à fermer les centres de la DCIM, d’autres, semblables, ont rouvert. Les témoignages de torture, de mauvais traitements, d’extorsion de rançons, de travail forcé, d’abus sexuel ou encore de famine, étoffent le rapport d’Amnesty.

Ouvrir des voies d’accès sûres

Au cours des six premiers mois de l’année, les gardes-côtes libyens, soutenus par l’UE, ont intercepté en mer et reconduit quelque 15000 exilés – plus que toute l’année passée, chiffre l’Organisation de défense des droits humains. Qui, témoignages à l’appui, dénonce encore le déroulement de ces prétendues opérations de sauvetage. Comportements négligents, violences, voire même dommages aux embarcations provoquant des noyades, vidéos des naufrages au lieu d’assistance viennent encore obscurcir le tableau. En dépit de ces agissements, les partenaires européens continuent à fournir une aide matérielle, dont des vedettes rapides, aux surveillants maritimes ramenant sous la contrainte les migrants qui tentent de fuir la Libye. Dans ce contexte, Amnesty International exhorte l’UE à suspendre sa coopération avec la Libye en matière de contrôle de l’immigration et des frontières. Et d’ouvrir de toute urgence des voies d’accès sûres aux migrants en quête de protection actuellement bloqués en Libye.

Toujours selon cette même source, au cours de ce premier semestre, plus de 700 migrants se sont noyés en Méditerranée centrale. Un chiffre revu à la hausse par l’Organisation internationale pour les migrations qui estimait à quelque 1146 le nombre de personnes disparues en mer depuis le début de l’année, rapporte la RTS.

SOS Méditerranée: renfort des Croix-Rouge

«C’est un mariage de raison, basé sur le partage de mêmes valeurs humanitaires et de principes de neutralité et d’indépendance», précise Guy Elliot, responsable de la communication à SOS Méditerranée. L’ONG a en effet récemment annoncé s’associer à la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) dans son activité d’assistance maritime des réfugiés naufragés en Méditerranée centrale, entre la Libye et l’Europe. «Nous sommes spécialistes du sauvetage, la FICR de l’aide aux personnes. Nos deux missions sont complémentaires», note encore le collaborateur de SOS Méditerranée, ravi de ce partenariat reposant sur un contrat annuel renouvelable. «Nous espérons qu’il s’inscrive sur le long terme.» Pour SOS Méditerranée ce renfort, considéré comme un honneur, met encore en lumière l’absolue nécessité de son rôle. Dès ce mois, une délégation de la FICR va rejoindre le bateau de sauvetage, l’Ocean Viking. Soins médicaux, soutien psychologique, nourriture, vêtements, produits d’hygiène et informations font partie de ses prestations. A cet effet, la FICR a lancé un appel de recherche de fonds, estimant à 2 millions de francs le coût annuel de son engagement sur un budget total de 8,3 millions de francs nécessaire à l’Ocean Viking, entre location du navire et personnel à bord. Président de la Fédération, Francesco Rocca souligne, dans un communiqué: «Il est inacceptable que des personnes continuent de périr en mer, aux portes de l’Europe: c’est un échec patent de la communauté internationale. C’est pourquoi nous avons décidé, une nouvelle fois, de porter notre aide d’urgence vitale en mer et nous appelons nos partenaires et nos donateurs à nous soutenir dans cette opération.» Les ONG, rappelle encore Guy Elliot, ne font que combler le vide laissé dans la région par les Etats en matière de sauvetage. Alors que le nombre de décès explose en Méditerranée, l’Ocean Viking a secouru, depuis le 1er janvier, 1916 rescapés.

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