Racheter du 2e pilier, ça rapporte
![Bas de laine suspendu à un étendage.](/sites/default/files/styles/image/public/images/webcaisse_pension_inegalite_01_l1030734.jpg?itok=7RLwu0pE)
Une manière de se constituer un bas de laine pour ses vieux jours est le rachat dans le 2e pilier. Cette solution permet d’améliorer les prestations futures de sa caisse de retraite.
Il existe une possibilité de combler ses lacunes de cotisations dans la prévoyance professionnelle. Les éclaircissements de Dario Chiaradonna, d’Unia, fin connaisseur du 2e pilier.
Nous sommes nombreux à accuser, pour une raison ou une autre, une lacune dans notre prévoyance professionnelle. Une possibilité existe cependant de rattraper les années de cotisations perdues dans le 2e pilier. Et c’est plus intéressant que de souscrire à un 3e pilier, comme l’explique Dario Chiaradonna, vice-président de la caisse de pension du personnel d’Unia et membre du conseil de plusieurs institutions de prévoyance.
Le rachat du 2e pilier, à quoi ça sert? Est-ce intéressant?
En tant qu’affilié au 2e pilier, notre parcours professionnel ou de vie, tel qu’un séjour à l’étranger ou une période sans activité lucrative, peut se traduire par des lacunes de cotisations LPP. Ces lacunes risquent d’engendrer des prestations moindres lors du départ à la retraite.
Il faut considérer le rachat dans le 2e pilier comme une solution pour améliorer les prestations futures de sa caisse de retraite. Et cet investissement pour sa retraite se traduira également par une meilleure couverture des risques et, par conséquent, des prestations améliorées pour les survivants, soit le conjoint et les enfants, en cas de décès ou d’invalidité.
C’est le cas lorsque la caisse fonctionne en primauté de cotisations, c’est-à-dire que le capital accumulé détermine la rente de veuvage, d’orphelins et d’invalidité, ce qui est pratiqué par une majorité de caisses de retraite en Suisse. Sur ce point, on peut consulter le règlement de sa caisse afin de connaître le type et la manière dont la caisse détermine les prestations assurées autres que la rente de retraite, par exemple les risques liés au décès, à l’invalidité, etc.
Le rachat est-il déductible du revenu imposable et permet-il de réduire sa charge fiscale?
Effectivement, c’est un aspect méconnu du rachat des lacunes de cotisations dans le 2e pilier, qui représente le deuxième avantage d’un rachat. Mon but n’est pas de promouvoir l’optimisation fiscale, mais il s’agit là d’une réalité dans les questions liées à la prévoyance professionnelle. Les rachats sont donc déductibles fiscalement, et dans leur intégralité, du revenu imposable, car il n’y a pas de maximum autorisé, contrairement au 3e pilier.
Pour connaître le potentiel de rachat, il faut se référer au certificat de prévoyance que la caisse devrait envoyer chaque année.
Cette déductibilité n’est toutefois pas toujours permise. Dans le cas où un retrait en capital a déjà été effectué, comme dans le cadre de l’encouragement à la propriété, un rachat n’est pas possible tant que ce retrait n’est pas restitué et la lacune reconstituée. De plus, les années rachetées sont soumises à une période de blocage de trois ans. Donc, si un retrait a lieu durant ce délai, la déduction fiscale est perdue avec pour conséquence le remboursement des impôts économisés.
Par ailleurs, il y a d’autres dispositions particulières et restrictions à l’approche de l’âge de la retraite auxquelles il faut faire très attention. Il faut vérifier le règlement de la caisse de retraite et la contacter afin d’éviter d’avoir des mauvaises surprises.
Vaut-il mieux racheter tout d’un coup, si l’on a la possibilité, ou étaler ses rachats sur plusieurs années?
Si l’idée est d’effectuer des rachats pour profiter de la déduction fiscale, l’étalement sur plusieurs années peut être une idée intéressante. Mais cela doit être relativisé, car l’impact fiscal dépend aussi des paramètres (revenus, situation personnelle, etc.) liés à l’année fiscale en question qui déterminent les barèmes fiscaux. Si les montants à racheter sont importants, il va de soi que l’étalement est plus une nécessité qu’une pratique, car peu de personnes peuvent faire des versements à cinq chiffres d’un coup.
Comment faut-il procéder pour effectuer le rachat?
Une fois toutes ces dimensions analysées, et si les conditions sont remplies, il s’agira de prendre contact avec sa caisse de retraite pour les aspects pratiques: demande de formulaire, envoi du bulletin de versement, confirmation du rachat, etc. Il est important que la caisse transmette un certificat de prévoyance mis à jour qui tienne compte du versement effectué.
Quelle est la différence avec un 3e pilier? Au choix, vaut-il mieux racheter du 2e pilier?
Le 3e pilier est un produit financier qui cache d’innombrables variations selon les instituts financiers en faisant la promotion. Aussi, il faut faire la distinction entre le 3a, qui consiste dans une solution de prévoyance liée, et le 3b, qui, lui, représente une solution de prévoyance libre. Ces deux produits n’ont pas les mêmes caractéristiques fiscales, le 3a permet une déductibilité fiscale alors que, pour le 3b, c’est rarement le cas et dépend des lois fiscales cantonales. Dans les deux cas, ces produits se retrouvent souvent sous forme d’assurance-vie et des primes mensuelles sont dues. Très fréquemment, ces primes sont investies dans des fonds placés sur les marchés, qui font miroiter des performances intéressantes en passant sous silence les risques que ces produits impliquent: volatilité importante, risque de perte lors du retrait du capital à un moment de baisse boursière, etc. Le 3b connaît moins de restrictions légales que le 3a, notamment s’agissant de l’obligation d’avoir une activité lucrative ou pour désigner le bénéficiaire de ce capital en cas de décès. Pour finir, la caractéristique fondamentale du 3e pilier est simplement la possibilité de récupérer le capital, sans droit à un versement d’une rente, et cela doit être souligné fortement.
Le 2e pilier, lui, permet un choix entre le capital et une rente, c’est là, la grande différence, sans oublier les rentes expectatives possibles.
Le choix selon moi est clair: s’il existe un potentiel de rachat dans sa caisse de retraite, cela doit primer sur un versement dans le 3e pilier. Un rachat apporte une amélioration des prestations réglementaires de sa caisse de retraite. Si l’argument fiscal fait hésiter, là aussi le 2e pilier l’emporte largement sur la constitution d’un 3e pilier tant que le potentiel de rachat n’est pas épuisé. Enfin, je vois un troisième avantage au rachat. Les intérêts versés par la caisse de retraite sont historiquement plus élevés que les comptes de prévoyance 3a où l’épargne est simplement souvent «parquée», sans oublier que ce rachat vient s’additionner à son capital de vieillesse, ce qui contribue à la production des intérêts. Enfin, un dernier point important à l’avantage du 2e pilier concerne les frais de gestion. Les frais totaux (appelés TER) d’une gestion active d’un fonds de prévoyance 3a sont souvent proche de 1% par an alors que dans le 2e pilier, la moyenne est de 0.5%.