Salaires minimums: une motion incompatible avec la Convention No 26 de l’OIT signée par la Suisse
Je me réfère à la nouvelle selon laquelle le Conseil des Etats a avalisé une motion d’Erich Ettlin dont l’objectif est de laisser tomber un salaire minimum cantonal au profit des salaires conventionnels lorsqu’il existe une convention collective nationale pour le secteur (voir L’ES du 27 juillet 2022).
La procédure prévue par la motion Ettlin n’est guère compatible avec une convention de l’Organisation internationale du travail (OIT) ratifiée par la Suisse en 1947, à savoir la Convention sur les méthodes de fixation des salaires minima, 1928 (No 26). Cette Convention a été ratifiée par 104 autres Etats membres de l’OIT. Elle est complétée par une Recommandation (No 30).
Tout Etat membre de l'OIT qui ratifie la Convention No 26 s'engage à instituer ou à conserver des méthodes permettant de fixer des taux minimums de salaires pour les travailleurs employés dans des industries ou parties d'industries (Article 1). En Suisse, les cantons représentent des parties d’industries.
Selon l’Article 3.2 al. 3 de la Convention: «Les taux minima de salaires qui auront été fixés seront obligatoires pour les employeurs et travailleurs intéressés; ils ne pourront être abaissés par eux ni par accord individuel, ni, sauf autorisation générale ou particulière de l'autorité compétente, par contrat collectif.»
Les taux minimums peuvent donc être abaissés, mais seulement à deux conditions qui ne sont pas respectées par la motion Ettlin. Premièrement, le contrat collectif doit être négocié ou accepté par «les employeurs et travailleurs intéressés», donc par les employeurs et les travailleurs dans un canton donné. Une convention collective nationale ne suffirait pas. Deuxièmement, il faut une autorisation de «l’autorité compétente», qui est dans ce cas une autorité d’un des cantons concernés, et non pas une autorité nationale.
Edward Sussex, membre d’Unia, Genève