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Unia dénonce l’emploi massif d’intérimaires sur le chantier du BIT

 Pour Unia, il est inconcevable que le chantier du Bureau international du travail, garant des normes internationales, soit un lieu où la précarité et la flexibilité de la main-d’œuvre temporaire soient exploitées pour garantir un maximum de profit.
© Thierry Porchet

Pour Unia, il est inconcevable que le chantier du Bureau international du travail, garant des normes internationales, soit un lieu où la précarité et la flexibilité de la main-d’œuvre temporaire soient exploitées pour garantir un maximum de profit.

Le syndicat a mis la main sur des plannings qui montrent que le taux de temporaires dépasse 50%, le groupe Orllati est pointé du doigt

Sur ses chantiers de désamiantage à Genève, l’entreprise Orllati recourt massivement à de la main-d’œuvre temporaire, dénonce Unia. Selon les plannings hebdomadaires internes couvrant la période des mois de février à août, que le syndicat s’est procuré, le ratio de travailleurs intérimaires dépasse 50%. Même le chantier du Bureau international du travail (BIT), qui devrait pourtant montrer l’exemple, n’échappe pas à cette pratique contestable. «Il s’agit d’un système de management de la précarité, qui repose sur l’emploi d’un maximum de temporaires, le recours à outrance à la flexibilité et le refus de toute augmentation de salaire. L’argent économisé sur le dos des travailleurs et des intérimaires va directement dans le porte-monnaie de la famille Orllati. C’est légal, mais pas moral», fulmine José Sebastiao. Surtout que, comme le relève le coresponsable de la construction d’Unia Genève, «la majorité des temporaires sont engagés par Jobtis SA, dont la famille Orllati est actionnaire. L’argent passe de la poche gauche à la poche droite.»

Payés au plus bas

Le groupe vaudois se défend en évoquant dans un communiqué «des fluctuations plus importantes en période estivale pour permettre à nos ouvriers de prendre leurs vacances». «Ce n’est pas vrai. Les relevés d’effectifs depuis février montrent que, pour le désamiantage à Genève, Orllati tourne à l’année avec des temporaires», rétorque José Sebastiao. «Certains préfèrent travailler en temporaire pour garder une certaine flexibilité», avance aussi la société. «J’ai rarement vu un travailleur privilégier ce statut, peut-être un sur mille…» commente le secrétaire syndical. «Dans tous les cas, nous nous attachons à ce que tous, collaborateurs fixes ou temporaires du gros œuvre ou du second œuvre, bénéficient des mêmes conditions salariales», assure encore Orllati. «Nous doutons que tous les salaires soient en ordre, mais nous ne pouvons l’affirmer faute d’avoir les informations nécessaires. Ce que l’on sait, c’est que les travailleurs temporaires sont toujours payés au plus bas de l’échelle salariale, comme manœuvres, alors même qu’ils sont qualifiés», explique le responsable syndical.

De son côté, le BIT a indiqué à plusieurs quotidiens avoir été informé de cette situation par Unia le 10 juillet et que le taux de temporaires a été ramené à sa demande à 25% sur le site. Or, interrogé par L’Evénement syndical, le BIT doit reconnaître que ce chiffre ne fait pas de distinction entre désamiantage et rénovation générale. Dans la semaine du 6 au 10 août, on dénombrait ainsi 12 travailleurs fixes pour 15 intérimaires employés à la réduction de l’amiante. «Orllati a un contrat global pour toutes les installations de site, la démolition, le désamiantage, etc., pas un contrat à la pièce. Il faut noter également que ce contrat a été conclu avec Steiner, l'entrepreneur général, et non avec le BIT», se justifie Mark Underhill, le responsable de la rénovation du bâtiment.

10% au maximum

«L’organisation internationale aurait dû contrôler Orllati, estime José Sebastiao. Ce que nous exigeons, c’est un maximum de 10% d’intérimaires sur le chantier de rénovation du BIT.» Est-ce envisageable? «Le BIT a proposé que nous continuions à aborder cette question par le biais d'un dialogue social entre les représentants des employeurs et des travailleurs sur place et que notre objectif soit de réduire le recours au travail temporaire au minimum. Nous espérons que ces discussions aboutiront à un accord entre toutes les parties», répond Mark Underhill. La semaine dernière, Unia attendait encore qu’une rencontre à cette fin soit inscrite à l’agenda.

Des pas en avant ont déjà été réalisés sur la problématique. En tant que maîtres d’ouvrage, les communes de Vernier et de Carouge se sont déjà engagées à limiter à 10% le taux de temporaires sur leurs chantiers. Pour sa part, le Canton a modifié le règlement sur l’attribution des marchés publics pour n’autoriser que 20%, voire 40% dans les situations exceptionnelles. La disposition est pour le moment suspendue après un recours de la faîtière des agences d’intérim, Swissstaffing.

Cet objectif des 10% reste l’une des principales revendications d’Unia Genève dans le secteur de la construction et sera mise en avant cet automne au côté du maintien de la retraite anticipée et de la semaine de 42 heures dans le bras de fer avec la Société suisse des entrepreneurs (SSE). Le syndicat annonce des actions sur les chantiers du bout du lac dès la semaine prochaine. «La SSE est en train de nous pousser vers un conflit assez dur, constate le secrétaire syndical. On se dirige vers une grande grève en Suisse, la plus grande que Genève ait connue dans le secteur du bâtiment.»

 

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