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Unia dénonce une dérégulation radicale du télétravail

Ordinateur sur la table du petit-déjeuner
© Thierry Porchet

Il est nécessaire d’encadrer le télétravail, qui rend plus floue la frontière entre vie privée et vie professionnelle. Unia ne veut pas d'une flexibilisation à outrance.

Pour le syndicat, le projet en discussion au Conseil national est désastreux en termes de santé. Les critiques émises lors de la phase de consultation n’ont pas été assez prises en compte.

Depuis la pandémie de Covid, le télétravail s’est généralisé dans les entreprises. Il est toutefois nécessaire de l’encadrer, puisqu’il rend plus floue la frontière entre vie privée et vie professionnelle. Mais l’avant-projet de modification de la Loi fédérale sur le travail, en discussion au Conseil national, suscite de fortes craintes. Dans un communiqué de presse, Unia le qualifie de «démantèlement radical au détriment de la santé des salariées et des salariés», cela sous couvert de flexibilité. 

Parmi les dispositions qui fâchent le syndicat, il y a le fait que les employés travaillant à distance devraient être à la disposition de leur employeur sur une amplitude horaire de 17 heures. Certes, ils ne doivent pas travailler tout ce temps, mais leurs heures de travail peuvent s’effectuer dans cette fourchette. Autrement dit, quelqu’un qui commence à 8h devrait rester disponible jusqu’à 1h du matin… «Si on s’interrompt pour prendre des pauses, aller chercher les enfants à l’école ou préparer le repas, la journée de travail ne prendrait véritablement fin qu’au bout de 17 heures, souligne Mirjam Brunner, spécialiste en droit du travail à Unia. Tant qu’on sait qu’on doit encore travailler après, on ne se repose pas vraiment.»

Moins de temps de repos
La syndicaliste regrette par ailleurs le fait que la Commission de l’économie ait biffé la disposition octroyant une certaine autonomie aux salariés quant à l’organisation de leurs horaires de télétravail: «Du coup, la flexibilité ne profite qu’à l’employeur», note-t-elle. Autre grief, le temps de repos quotidien (soit le temps libre plus le sommeil), qui serait réduit de onze heures à neuf heures – à peine deux heures de plus que les sept heures de sommeil minimales prévues par la Loi sur le travail. En plus, il serait permis de l’entrecouper en cas de tâches urgentes, sauf de 23h à 6h.

Encore un point qui inquiète Unia, l’introduction du télétravail le dimanche, qui deviendrait possible sans autorisation. La commission a cependant mis un peu d’eau dans son vin, limitant cette possibilité à six dimanches par an – au lieu de neuf dans son projet initial – avec majoration du salaire de 50%. Enfin, il est prévu un droit à la déconnexion, impliquant qu’on n’a pas à être joignable pendant le repos quotidien et le dimanche, mais en des termes trop vagues pour Mirjam Brunner: «Il n’est pas précisé comment on fait concrètement pour garantir ce droit.»

Nombreux avis critiques
Selon Unia, la plupart des participants à la phase de consultation se sont dit préoccupés par ce projet – qu’il s’agisse de la Société de médecine du travail, des universités de Genève et de Bâle, de l’association professionnelle Public Health, de l’Association des inspections cantonales du travail et des autorités cantonales du marché du travail – mais la majorité de la Commission de l’économie n’en a pas vraiment tenu compte. «Il est scientifiquement prouvé depuis longtemps que les journées de travail trop longues et les temps de repos trop courts constituent un risque pour la santé, prévient le syndicat dans son communiqué. Les salariés ne veulent pas d'un allongement de leurs journées. Au contraire, ils ont besoin de plus de temps libre véritable.»

Mirjam Brunner admet que le télétravail peut aussi avoir des avantages, «mais il faut l’encadrer. Cela ne doit pas être un prétexte pour flexibiliser les horaires à outrance, car il y a des risques accrus pour la santé, notamment psycho-sociaux, à cause du mélange entre travail et vie privée.»

Le projet a été transmis au Conseil fédéral pour avis. Il sera probablement soumis lors de la session d’automne au Conseil national. Unia, qui redoute des conséquences «dramatiques» pour la santé des travailleuses et des travailleurs, espère que ce dernier corrigera le tir.

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