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Une fenêtre ouverte sur Gaza

Un jeune homme ramasse de la farine tombée au sol.
DR

Dans le film «Sorry Cinéma», des Gazaouis ramassent au sol de la farine venue de sacs tombés d’un camion d’aide humanitaire, à laquelle s’est mélangé du sable (image tirée du film).

Du 28 novembre au 2 décembre, le festival «Palestine, filmer c’est exister» nous donne à voir le quotidien des Palestiniens, en particulier de ceux qui vivent sous les bombes.

Les images des actualités permettent d’appréhender l’horreur de la guerre qui se déroule à Gaza, mais elles ne suffisent pas à comprendre le quotidien de la population. Les rencontres cinématographiques «Palestine, filmer c’est exister», qui ont lieu à Genève du 28 novembre au 2 décembre, sont l’occasion d’ouvrir une fenêtre sur la réalité vécue par les Palestiniens et les Palestiniennes, en particulier dans l’enclave qui vit sous les bombes depuis plus d’un an.

Le festival présente chaque année depuis 2012 une sélection de fictions et de documentaires réalisés par des cinéastes palestiniens, dont certains participent à des rencontres avec le public. Cette édition propose notamment un gros plan sur le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie. Par ailleurs, trois jeunes cinéastes issus de la faculté Dar Al-Kalima, à Bethléhem, seront également présents dans le cadre du partenariat avec la HEAD-cinéma.

Gaza vu de l’intérieur

Mais le point fort des rencontres sera le projet «From Ground Zero», qui jalonnera chaque projection. Il s’agit d’une série de courts métrages tournés à Gaza dans les mois qui ont suivi le 7 octobre 2023. Le réalisateur palestinien Rashid Masharawi, qui vit en France actuellement, a souhaité donner une voix aux Gazaouis à travers des fictions, documentaires ou films d’animation réalisés par des cinéastes locaux, pris au piège de l’enclave coupée du monde, et amateurs pour la plupart. Il en est ressorti vingt-deux films de trois à six minutes, autant de témoignages bouleversants qui donnent chair aux souffrances vécues par la population civile, mais où l’espoir reste malgré tout présent.

«Je voulais des histoires inédites, différentes de ce qu’on entend aux informations, confie Rashid Masharawi. C’est très important que les médias montrent et expliquent au monde ce qu’il se passe à Gaza, mais une nouvelle chasse l’autre et cela appartient très vite au passé. En revanche, les films de “From Ground Zero” s’inscrivent dans la durée, parce que c’est du cinéma, de l’art. On pourra encore les voir dans plusieurs années, voire des décennies. Et puis, le cinéma fait de nous autre chose que des combattants, des victimes ou des héros, il fait de nous une nation.»

Filmer sous les bombes

Les tournages se sont déroulés de janvier à mai 2024, dans des conditions extrêmement difficiles. «Comme tous les Gazaouis, les participants et les participantes au projet doivent fuir les bombardements et ont perdu des proches, raconte Rashid Masharawi. Tous sont encore en vie aujourd’hui, mais l’un d’eux a perdu huit membres de sa famille la semaine dernière. C’est ce qui fait le caractère exceptionnel de leurs films. Ce n’est pas seulement du cinéma, c’est la vie. Ces cinéastes ne font pas que raconter une histoire, ils sont l’histoire.»

La logistique a aussi été compliquée, le matériel de tournage étant rare à Gaza et les coupures d’électricité et de télécommunications fréquentes. Près de la moitié des films a été tournée au smartphone, ce qui a impliqué un gros travail de postproduction effectué en France notamment. «La plupart des cinéastes étaient des débutants, explique Rashid Masharawi. Pour plus de la moitié d’entre eux, il s’agissait de leur premier film. Des professionnels les ont épaulés sur place ou à distance, depuis les pays arabes et l’Europe. Ce projet est un grand travail d’équipe, qui a pris la forme d’un atelier où ils ont appris comment faire du cinéma. Certains continuent d’ailleurs de filmer.»

Parmi les nombreux soutiens dont a bénéficié «From Ground Zero», on compte le réalisateur et producteur genevois Nicolas Wadimoff, qui a beaucoup travaillé en Palestine. Sa société Akka Films a donné un coup de pouce financier pour la postproduction, et fait jouer son réseau pour la diffusion des films en Suisse et ailleurs. «L’incarnation des histoires, le fait qu’elles viennent vraiment de personnes qui vivent les choses de l’intérieur, avec beaucoup d’émotions, permet à ceux qui voient ces films d’appréhender la réalité de Gaza dans toute sa diversité, estime le Genevois. Ce projet peut aider à mettre Gaza dans l’esprit des gens, et dans leur cœur.»

Les films ont déjà été montrés dans de nombreux pays et continuent de tourner dans le monde entier. «Palestine, filmer c’est exister» représente une occasion à ne pas louper pour avoir un autre regard sur la guerre qui ravage la bande de Gaza. K

Informations et programme: palestine-fce.ch

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