Le revenu de transition écologique entre en politique
Le Jura, et bientôt Vaud, se penchent sur le revenu de transition écologique dont l’un des buts est la création d’emplois durables
Le 3 mars, le Parlement jurassien a voté en faveur d’un postulat demandant une étude sur la mise en place d’un revenu de transition écologique (RTE) à l’échelle cantonale. Dans le canton de Vaud, le Grand Conseil devrait aussi se positionner ces prochains mois. Les deux textes ont été déposés par des députés Verts en mai 2020 en écho à la pandémie et à ses répercussions sociales et économiques, mais aussi pour ouvrir une piste face à la crise climatique et à l’avènement du numérique qui obligent et obligeront bon nombre de travailleuses et de travailleurs à se reconvertir.
En substance, le RTE représente une aide financière individuelle et sociale, limitée dans le temps, qui inclut une formation pour la personne en décrochage professionnel, obligée de se reconvertir, ou porteuse d’un projet. Plus globalement, la mesure encourage une économie durable.
Le député Vert jurassien, Baptiste Laville, auteur de la motion transformée en postulat, souligne le potentiel du RTE en cette période cruciale: «Tant qu’à orienter les gens touchés par la crise, autant qu’ils soient encouragés à travailler dans des métiers en phase avec les enjeux de demain, dans des domaines durables. Le RTE permettrait d’encourager la société à évoluer plus rapidement vers des impératifs qui ne soient plus seulement économiques, mais aussi sociaux et écologiques.»
Pistes de reconversion
«Pour éviter qu’il y ait des perdants de la transition écologique, que ce soit des employés de secteurs très polluants comme l’aviation par exemple, ou qui font face à une numérisation croissante, cette mesure offre des pistes de reconversion importante», explique la députée vaudoise Rebecca Joly. Pour l’heure, la commission en charge d’étudier son postulat, recommande à une courte majorité de le soutenir. Pour la Verte, cette mesure offre aussi «des solutions pour les personnes à l’aide sociale ou au chômage depuis longtemps». Dans ce sens, elle estime que les structures existent déjà. «Il s’agit de mettre en relation les services sociaux et l’ORP, pour qu’ils travaillent main dans la main avec des porteurs de projets qui vont dans le sens de la transition, mais qui n’ont pas les investissements nécessaires dans un premier temps.» Et de mentionner quelques exemples: une exploitation agricole reconvertit une partie de son terrain à la permaculture et a donc besoin de main-d’œuvre; une épicerie de proximité ouvre ses portes mais manque d’un vendeur qualifié; une bibliothèque de prêt d’objets a besoin d’un employé fixe. Autant de postes supplémentaires qui pourraient s’inscrire dans un RTE.
Baptiste Laville propose, quant à lui, la création d’une coopérative de transition écologique – regroupant autorités, associations, entreprises privées, et pourquoi pas syndicats – telle que définie par la conceptrice du RTE, Sophie Swaton, économiste et philosophe, professeure à l’Université de Lausanne et directrice de la Fondation Zoein.
Quid du nerf de la guerre: le prix? «Il y aura un coût de démarrage, mais ensuite cela permettra aussi de sortir des gens de l’aide sociale…», répond Rebecca Joly.
Actuellement le RTE est pratiqué sur quelques territoires français, avec la collaboration de Sophie Swaton. En juin 2020, dans nos colonnes*, cette dernière expliquait le potentiel de la mesure dans l’émancipation personnelle et l’intégration sociale, et le rôle de la transition écologique dans la création d’emplois, «avec des millions de postes à la clé».