Les demi-classes sont bien notées par les enseignants
Si le retour des élèves en classe se déroule plutôt bien, les syndicats pointent une tension entre les exigences pédagogiques et le respect des règles sanitaires
Lundi passé, tous les écoliers romands ont repris l’école normalement. Les syndicats d’enseignants n’ont pas été suivis, ils avaient demandé que l’enseignement en demi-classe, pratiqué depuis le 11 mai par tous les cantons romands, à l’exception du Valais, puisse être maintenu deux semaines supplémentaires, voire jusqu’aux vacances d’été. Les directeurs cantonaux de l'Instruction publique ont jugé, au contraire, que la rentrée du 11 mai s’était déroulée dans de bonnes conditions et que, dès lors, rien ne s’opposait à un retour à l’horaire habituel vu l’évolution positive de l’épidémie.
Les syndicats avaient formulé un certain nombre de remarques et de critiques la semaine dernière. «Cette rentrée s’est globalement assez bien passée, même si certains établissements posent encore problème», indique Cora Antonioli, présidente du secteur enseignement du Syndicat des services publics (SSP) vaudois. Le syndicat a interrogé 300 de ses membres, il ressort du sondage qu’un tiers des enseignants vient la boule au ventre à l’école. «Ils ont des craintes par rapport à leur santé, à celle de leurs proches ou encore de ne pas appliquer correctement les règles sanitaires. Notre enquête confirme qu’il est très difficile de respecter les distances avec les élèves. Pour les petits, c’est évident, mais pour les plus grands, ce n’est pas simple non plus de rester derrière son pupitre ou de porter un masque ou une visière. Il y a une tension entre les exigences pédagogiques et les règles sanitaires», dit la jeune enseignante, qui pointe également l’incohérence d’un plan sanitaire destiné à l’ensemble de l’école obligatoire. «On applique un plan pour les petits, alors qu’il y a des élèves de plus de 16 ans. Cela soulève des questions de santé et de sécurité.» Pour la syndicaliste, le maintien des demi-classes aurait permis de «garder un sentiment de sécurité pour les enseignants», tout en recréant des liens avec les élèves et en rattrapant le temps perdu durant le confinement. «On ne peut pas ignorer que les enseignants ont peur.» La Société pédagogique vaudoise (SPV) a, pour sa part, questionné près de 1900 enseignants et arrive aux mêmes résultats que le SSP. Cela dit, la SPV note qu’après la première semaine d’école, le niveau de stress et d’angoisse a diminué de moitié.
Dernier gros souci, les salles des maîtres. «Il manque de produits d’hygiène et le plan sanitaire concernant les distances entre les tables de travail n’est pas respecté, pas mal d’enseignants sont désécurisés vis-à-vis de cela», selon Cora Antonioli. Le SSP a envoyé un courrier à la cheffe du Département vaudois de la formation, Cesla Amarelle, pour lui présenter tous ces problèmes.
Du côté des parents, la rentrée du 11 mai a aussi été une source de stress. Maman un peu inquiète de trois jeunes enfants, Patricia Bucaille avait écrit fin avril à Cesla Amarelle. «Je n’ai pas reçu de réponse, mais j’ai appelé les différentes maîtresses, qui m’ont rassurée. C’était moins pire que ce que j’avais pu imaginer. Si vous avez une bonne maîtresse, elle fera les choses correctement», explique cette horlogère et maître socioprofessionnelle. Des échos recueillis dans plusieurs cantons laissent à penser que les parents se sont, à l’image de Patricia Bucaille, un peu tranquillisés.
Un plan pédagogique pour la rentrée
Le 8 juin prochain, ce sera au tour des élèves du secondaire II de retourner en cours, si le Conseil fédéral donne son feu vert lors de sa séance de ce mercredi 27 mai, ce qui devrait être le cas. Cora Antonioli enseigne l’allemand au gymnase. Comment elle et ses collègues appréhendent-ils cette rentrée? «Cela va être compliqué de rester à deux mètres, mais nous sommes heureux de reprendre. Le décrochage scolaire est important, avec une augmentation des inégalités entre élèves, il nous paraît dès lors illusoire d’atteindre les objectifs scolaires dans ces trois dernières semaines avant la fin de l’année. Nous demandons un vrai plan pédagogique pour la rentrée prochaine permettant de remettre à niveau les élèves.»