«Migros a une attitude totalement indigne»
Plus de 200 salariés chargés des dégustations ont vu leur contrat modifié et ont été plongés dans l’extrême précarité
Plus de 200 employés de Migros jetés comme des Kleenex M-Budget. Il y a deux semaines, l’émission Kassensturz de la télévision alémanique SRF a révélé les pratiques peu reluisantes du géant orange envers les collaborateurs de la société Trade Marketing Intelligence (TMI). Créée en 2014, cette filiale chargée des dégustations et des promotions a été vendue à l’automne dernier à deux cadres à l’issue d’une opération MBO (management buy-out), le groupe Migros conservant une participation en tant que partenaire stratégique.
Tous les salariés ont alors reçu un congé-modification de leur contrat de travail à signer sous peine de perdre leur emploi. Conséquences: une sortie de la Convention collective nationale de travail (CCNT) Migros, un passage d’un horaire fixe à du travail sur appel et un salaire horaire réduit de 23 à 21 francs. Dans le même temps, le distributeur a diminué le nombre de promotions de produits. «Je travaille habituellement douze jours par mois. En janvier, je n’ai eu que trois jours», témoigne Doris dans l’émission.
«TMI est une société indépendante depuis le 1er janvier 2019, ce qui explique pourquoi les employés reçoivent des contrats de travail en dehors de Migros. Tous les employés ont été informés de manière transparente des changements à venir», s’est défendue laconiquement l’entreprise. «On ne peut que critiquer vertement Migros, qui se présente comme un employeur modèle, le premier du secteur privé en Suisse, mais qui, en réalité, n’assume pas ses responsabilités et, en se cachant derrière des astuces juridiques, a une attitude totalement indigne envers des collaborateurs aux conditions déjà précaires», dénonce Anne Rubin, membre de la direction du secteur tertiaire d’Unia.
Assemblées du personnel
Quelques jours après la diffusion de l’émission, rétropédalage du géant orange. «Pour 2019, Migros garantit un salaire annuel et des prestations sociales pareils à ceux de 2018», écrit la direction de TMI dans un courriel envoyé aux collaborateurs. «L’émission de la SRF et le combat de certaines employées qui ont osé dénoncer ce scandale a fait reculer Migros. Selon les juristes du syndicat, le maintien de la CCNT Migros durant une année après le transfert des rapports de travail est toutefois obligatoire», explique Anne Rubin.
«La CCNT sera-t-elle correctement appliquée? Les salaires de 2018 seront-ils véritablement garantis? Et que se passe-t-il pour les personnes qui ont refusé les modifications de contrat et qui ont été licenciées? Beaucoup de questions restent ouvertes. Nous invitons tous les employés concernés à venir en discuter lors d’assemblées générales régionales*. S’ils se mobilisent, nous pourrons les accompagner.» Histoire que le petit chocolat que l’on déguste entre les rayons du supermarché n’ait pas le goût trop amer d’une extrême précarité.
* Pour la Suisse romande: assemblée TMI le lundi 4 mars 2019 à 10h au secrétariat Unia, place de la Riponne 4 à Lausanne.