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Percer le secret de la vie...

Portrait de Pamela Silva Barrientos.
© Thierry Porchet

Pamela Silva Barrientos veut devenir ingénieure en technologie du vivant. Une ambition qui ne l’éloignera pas des valeurs syndicales défendues.

Assistante en pharmacie, Pamela Silva Barrientos se bat pour de meilleures conditions de travail même si elle envisage de changer de profession

Pas question de lâcher les collègues et de tourner le dos au syndicat. Membre du comité vaudois des assistantes en pharmacie, Pamela Silva Barrientos poursuit son engagement, même si elle ne restera pas dans la profession. La jeune femme de 26 ans a en effet décidé de reprendre en septembre des études pour devenir ingénieure en technologie du vivant. Mais dans l’intervalle, elle continue à lutter pour améliorer les conditions de travail dans la branche. «Le métier n’est pas valorisé», dénonce Pamela Silva Barrientos, qui s’est orientée dans cette voie un peu par hasard, mais n’a jamais imaginé y rester sa vie durant. Concrètement, la salariée évoque plusieurs problèmes. Celui d’abord des sous-effectifs permanents – il manque dans chaque officine un à deux employés, affirme-t-elle. Cette situation génère stress, fatigue et surcharge de travail avec, pour conséquences, du retard dans les tâches variées que remplit le personnel, entre activités administratives, commandes, préparation de semainiers... Et bien sûr, les interactions avec la clientèle. A ce propos, la syndiquée chez Unia rapporte les relations souvent compliquées avec cette dernière. «On nous prend généralement pour de simples vendeuses. Mais nous vendons des médicaments. Et devons, dans l’intérêt des personnes, poser des questions pour s’assurer que leur prise ne comporte pas de risques. Nombre de clients le prennent mal et nous demandent si nous sommes de la police. Une situation pesante.»

Inutile de se plaindre

La pénurie de médicaments suscite également des comportements hostiles et complique encore le travail des collaborateurs appelés à chercher d’autres solutions, des remèdes équivalents, etc. «Epuisant mentalement. Nous méritons davantage de reconnaissance», estime Pamela Silva Barrientos, qui milite pour une augmentation des salaires en tenant aussi compte des années d’expérience. «Aujourd’hui, une assistante en pharmacie titulaire d’un CFC gagne 4200 francs brut. C’est déjà mieux que quand j’ai commencé, à 3800 francs, mais c’est toujours insuffisant.» Dans tous les cas, celle qui a rejoint le Comité vaudois des assistantes en pharmacie, en 2020, plaide pour la conclusion d’une convention collective de travail dans la branche. Dans ce sens, elle insiste sur l’importance de s’engager pour y parvenir. «Nous plaindre ne sert à rien. A nous d’êtres acteurs du changement», lance l’employée, qui annonce aussi sa participation à la grève féministe le 14 juin précisant, au passage, que le métier qu’elle exerce compte une majorité de femmes. «Je serai présente. Il est nécessaire de faire entendre notre voix alors que les inégalités entre femmes et hommes persistent, que nous ne disposons toujours pas des mêmes droits dans les faits. Rien ne m’irrite plus que l’injustice.» Cette fibre combattive qui contraste avec la douceur et la réserve la caractérisant, Pamela Silva Barrientos dit l’avoir héritée de sa mère. «C’est une battante, un modèle pour lutter contre ses peurs. Elle est parvenue à très bien se débrouiller malgré les difficultés rencontrées dans un pays étranger. Et a toujours répété que “quand on veut, on peut”», indique Pamela Silva Barrientos, précisant que sa maman a quitté la Bolivie pour la Suisse avec elle, alors âgée de 7 ans, et ses deux petites sœurs, avant d’être rejointe par son mari dont elle divorcera peu après. «Elle s’est quasiment occupée seule de nous.»

Spectacle déchirant

Aujourd’hui, la native de La Paz souligne se sentir plutôt Suisse. «Je n’ai pas gardé d’attaches particulières avec ma patrie, mis à part la nourriture et la langue que je perds toutefois aussi en raison du manque de pratique.» Une remarque qui n’empêchera pas la Lausannoise d’adoption de partir à la découverte, en 2019, de son pays d’origine, curieuse de se confronter à ses racines. La voyageuse, hypersensible, sera alors frappée par la pauvreté, la mendicité et surtout le travail des enfants. «Ce spectacle m’a déchiré le cœur», note la jeune femme, qui nourrit le projet, en marge de son futur travail, de créer une ONG en faveur d’orphelins de Bolivie. Et confie encore avoir un intérêt personnel pour l’adoption. Mais auparavant, il s’agira de mener à bien sa prochaine formation. «Il me faudra trois ans pour le bachelor et bien le double pour terminer le doctorat que je vise», calcule la future étudiante, rêvant de travailler par la suite comme chercheuse et «de percer le secret de la vie». «C’est fascinant le nombre d’informations que livrent une cellule, un microbe, etc.», indique Pamela Silva Barrientos, qui se définit comme une personne déterminée et fiable, perfectionniste et impatiente. De nature plutôt optimiste, sociable tout en se montrant discrète et dans la retenue, cette hypersensible, aux rires et aux larmes faciles, se livre surtout avec ses proches. «Je fais clairement la différence entre le cadre professionnel et la vie privée», affirme celle qui se ressource auprès de ses amis, mais aussi dans la solitude et le sport.

Liberté au sommet

Fitness et randonnées: Pamela Silva Barrientos cultive le goût de l’effort. Et adore la montagne. «Au sommet, on se sent libre. On a aussi la satisfaction d’accomplissement, de réussite.» Un dernier point important pour la jeune femme qui redoute l’échec, sa plus grande peur. Au rang de ses loisirs, elle cite encore la lecture et dévore volontiers toutes sortes de livres à l’exception des polars qui l’angoissent. Sensible à l’écologie, Pamela Silva Barrientos note encore fabriquer ses produits ménagers, n’acheter que peu d’habits, utiliser les transports publics et limiter sa consommation de viande. Quant au bonheur, elle le définit par «l’acceptation de soi, comme on est, sans se soucier du jugement des autres». «Si je suis heureuse? Oui, Je vais reprendre des études qui m’intéressent. Et je vis l’existence que j’ai envie de mener», affirme l’assistante en pharmacie, prête à prendre un nouveau départ sans renier les valeurs syndicales qu’elle promet de continuer à défendre...