La branche du solaire recherche encore des apprentis
Le premier apprentissage d’installateur solaire débute en août. Des places restent à pourvoir. Le point avec le responsable de la formation professionnelle romande à Polybat, Sébastien Cettou
Les métiers de la transition énergétique représentent un enjeu crucial pour l’avenir de l’humanité. Et les citoyennes et les citoyens l’ont bien compris, le 9 juin dernier, en acceptant la Loi sur l’électricité. Dans ce sens, le nouvel apprentissage d’installateur et d’installatrice solaire, qui débutera en août prochain, tombe à pic. Mais il n’a pas encore le vent en poupe.
Plusieurs des 163 entreprises autorisées à former recrutent encore. Début juin, il restait plus d’une septantaine de places à pourvoir, selon Swissolar, l’association suisse des professionnels de l’énergie solaire. Si la branche emploie l'équivalent de 11000 postes à plein temps, c’est clairement insuffisant. «Pour atteindre les objectifs fixés par la stratégie énergétique 2050, le secteur doit augmenter cet effectif à 20000 d'ici à 2035, nécessitant la création d'environ 850 nouveaux emplois chaque année.»
En août, la première volée pour une AFP (Attestation fédérale de formation professionnelle, en deux ans) ou un CFC (Certificat fédéral de capacité, en trois ans) compte une centaine d’inscrits au niveau suisse: une septantaine à Polybau, sis à Uzwil, et près d’une trentaine dans sa filiale romande, Polybat aux Paccots. Cette école forme aussi les futurs couvreurs, échafaudeurs, storistes, façadiers et étancheurs à raison de 40 jours par année, par bloc de 5 jours, en résidentiel ou non. Sébastien Cettou, responsable de la formation professionnelle romande, se réjouit de cette nouvelle filière.
Pourquoi avoir mis sur pied un apprentissage spécifique d’installateur solaire?
La demande est très forte dans ce domaine, le manque de main-d’œuvre patent, à l’image des autres métiers du bâtiment. Face à l’urgence de la situation, cet apprentissage a été mis sur pied en 18 mois seulement. C’est un record pour la Confédération, les cantons et l’association Swissolar. Un installateur solaire formé pourra poser des panneaux photovoltaïques de A à Z. Jusqu’à présent, ce sont généralement des couvreurs qui les installent sur les toits, puis des électriciens qui les branchent. Certaines entreprises ont toutefois mis sur pied des formations spécifiques. D’autres, par contre, ont des pratiques peu professionnelles, générant des dégâts – que ce soit en termes d’étanchéité ou de fonctionnement des installations. L’apprentissage va faire du bien à la branche. Les connaissances et les compétences seront approfondies.
N’espériez-vous pas davantage que 28 candidats (selon les chiffres de Swissolar début juin) à Polybat?
De notre côté, c’était ce qu’on prévoyait. C’est très positif pour une nouvelle formation. Les inscriptions seront certainement beaucoup plus nombreuses l’an prochain. Par ailleurs, nous sommes encore ouverts aux candidatures. Il est possible également que de jeunes professionnels rejoignent l’apprentissage raccourci une fois leurs examens terminés et leur CFC en poche. Ceux-ci doivent justifier de 120 jours de pratique dans le solaire durant leurs trois années d’apprentissage dans un métier de l’enveloppe du bâtiment. Le recours à l’article 32 de l’Ordonnance sur la formation professionnelle permet aussi de faire valider ses expériences.
Y a-t-il des filles dans cette première volée?
A ma connaissance, non. Cela reste des conditions de travail assez pénibles, à l’extérieur, par tous les temps. Ayant fait mon apprentissage de ferblantier et de couvreur il y a trente ans, je peux dire toutefois que, dans la branche, le travail est devenu plus facile physiquement grâce aux nouveaux moyens de levage, aux nacelles, aux grues, etc. Reste que les panneaux solaires sont de plus en plus grands et lourds. Dans tous les cas, on doit les porter à deux, c’est un travail d’équipe.
Les métiers du bâtiment sont peut-être moins exigeants physiquement, mais plus stressants…
Parce qu’il manque de la main-d’œuvre partout et que les carnets de commandes des entreprises sont pleins. Je remarque que, malgré cette nouvelle filière, nous n’avons pour l’instant pas plus d’apprentis à Polybat que les années précédentes. Soit entre 120 et 130. Ce qui signifie que les autres métiers ont perdu des candidats.
Quelles solutions voyez-vous pour faire face à ce manque de personnel? Ne faudrait-il pas améliorer les conditions de travail et salariales?
Je pense que les salaires ne sont pas si mal, et je connais des entreprises actives dans le domaine de l’enveloppe des bâtiments qui sont passées à la semaine de 4 jours... Plus largement, c’est une question politique. Il s’agirait peut-être d’arrêter de pousser les jeunes à continuer des études coûte que coûte. Par ailleurs, et nous le remarquons aussi ici à l’école, le taux d’absentéisme chez les apprentis est élevé. Les entreprises ont parfois de la peine à trouver des employés fiables. Enseignant à Polybat depuis 17 ans, j’ai vu le niveau scolaire diminuer… De l’autre côté, il s’avère que la moitié des apprentis, en tout cas chez les étancheurs et les storistes, ratent leur CFC, à cause surtout de la pratique. Ce taux d’échec devrait pousser les cantons à contrôler davantage certaines entreprises qui forment mal et utilisent les apprentis comme de la main-d’œuvre bon marché. Il s’agit aussi d’enseigner aux entreprises à instruire.
Comment imaginez-vous le métier et les installations photovoltaïques dans dix ans?
Je pense que l’installateur solaire ne posera plus des panneaux uniquement sur les toits, mais aussi sur les autoroutes, les chemins-de-fer, les talus… Les tuiles photovoltaïques seront plus nombreuses, et les vitres solaires vont se développer. Mais le marché bouge tellement vite que c’est difficile d’émettre des hypothèses.
Davantage d’informations: polybat.ch