Les femmes veulent plus de temps pour vivre

La manifestation du 8 mars 2025, à Lausanne.
A l’occasion du 8 mars, Unia thématise la nécessité de réduire le temps de travail, notamment pour les femmes. Des actions et des manifestations ont lieu aux quatre coins de la Suisse.
Le 8 mars a lieu la Journée internationale des droits des femmes. Une date clé pour la mobilisation féministe et syndicale. Cette année, pour le 8 mars, le syndicat Unia met les projecteurs sur le thème de la réduction du temps de travail (RTT). Une revendication valable pour tous les travailleurs, et particulièrement pour les femmes, qui effectuent la majeure partie du travail de care non rémunéré. D’autres combats seront portés dans les régions, à travers des actions et des manifestations, comme la question du salaire minimum dans le canton de Vaud, ou encore le droit de manifester à Neuchâtel (voir le programme ci-dessous).
Aude Spang, secrétaire à l’égalité chez Unia, revient sur les enjeux de cette journée.
En quoi la thématique de la réduction du temps de travail (RTT) touche-t-elle particulièrement les femmes?
Aude Spang: Elle est portée par le mouvement de la Grève féministe depuis 2019. En Suisse, de manière générale, on travaille beaucoup trop par rapport au reste de l’Europe, et les femmes en particulier.
Elles effectuent encore deux tiers du travail de care, à savoir les tâches de soin, d’assistance et d’éducation, non rémunérées. Sur 50 heures travaillées dans la semaine par les femmes, 30 heures ne leur sont pas payées. Il y a un grand déséquilibre.
L’enjeu de la RTT sans perte de salaire permettrait d’avoir plus de temps pour vivre, pour prendre soin de soi et de sa santé, donc une meilleure conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle. Mais aussi un meilleur équilibre au sein des couples qui partageraient mieux le travail non rémunéré.
Comment concrétiser une mesure comme la RTT?
Nous agissons sur deux plans. D’abord à travers les négociations conventionnelles, d’ailleurs la RTT fait partie du cahier des revendications dans quatre ou cinq CCT. On a pu obtenir quelques avancées dans la construction et chez les échafaudeurs. Ça bouge aussi dans les métiers du bois.
Par ailleurs, on fait pression aux niveaux politique et médiatique, notamment à travers notre manifeste «Plus de temps pour vivre»*.
Les discussions préalables menées avec les secteurs montrent qu’un modèle unique qui s’appliquerait à toute la Suisse, comme la semaine de quatre jours, n’est pas envisageable. De nombreuses possibilités existent en matière de réduction du temps de travail, les plus opportunes devront être évaluées selon les besoins des branches. On peut citer, à côté de la réduction hebdomadaire du temps de travail, l’introduction de retraites anticipées, l’amélioration du congé maternité et paternité, l’introduction d’un congé parental, le droit à une réduction du taux d’occupation et à des périodes de formation continue, plus de vacances et de jours fériés payés, la semaine de quatre jours, les pauses payées, la suppression d’horaires fragmentés, etc.
Ce qui est sûr, c’est que 40 heures et plus, c'est trop! Avec la campagne pour une RTT, nous voulons établir une nouvelle norme de temps de travail. Plus précisément, nous visons un plein-temps plus court. Les travailleurs et les travailleuses devraient pouvoir disposer de plus de temps.
En quoi est-ce important, en tant que femme, de continuer à se mobiliser pour le 8 mars, tout comme on le fait le 14 juin et le 25 novembre?
Le 8 mars est important, car c’est une date internationale de lutte et de solidarité pour les femmes travailleuses et les personnes LGBTQIA+.
Il faut continuer à nous rendre visibles et à parler des questions féministes, car c’est seulement en persistant à faire pression qu’on peut lutter contre le recul de nos droits et obtenir des avancées. Rien que de mettre la question de la RTT sur le tapis est presque inédit en Suisse, car le sujet était quasi inexistant jusque-là. Le but est de faire avancer des idées qui trouvent peu d’écho, de planter des graines, en visant à obtenir des avancées sur le moyen terme.
Autre sujet de mobilisation féministe, les inégalités salariales. Cette semaine, une coalition contre la discrimination salariale s’est adressée à Beat Jans: de quoi s’agit-il?
Unia fait partie de cette coalition, car celle-ci porte des revendications que nous thématisons depuis plusieurs années. En 2020, la révision de la Loi sur l’égalité (LEg) a instauré l’obligation pour les grandes entreprises d’effectuer des analyses salariales. Or, sur le terrain, nous constatons ce que nous craignions, à savoir que cette révision est une coquille vide qui n’apporte pas de résultats ni d’améliorations en matière d’inégalités salariales. En effet, elle concerne uniquement les grandes entreprises, qui représentent une minorité. Quant aux analyses, si elles ne sont pas faites ou si elles présentent des inégalités, elles ne font l’objet d’aucun contrôle de l’Etat et aucune sanction n’est prévue.
Nous appelons donc à des améliorations. La première étape est cette lettre ouverte adressée au conseiller fédéral. Nous verrons quelle forme prendra la suite de la mobilisation.
Nous savons enfin que, cette année, devrait sortir un rapport intermédiaire du Conseil fédéral sur cette révision de la LEg et nous nous saisirons de cela pour appeler à une nouvelle révision afin que la loi soit renforcée et rendue plus efficace.
Pour signer le manifeste, c'est par ici !
Des actions ont eu lieu dans toute la Suisse. Zoom sur Genève et Lausanne.
Une vidéo de Virginie Zimmerli