Nettoyage: la nouvelle CCT romande obtient l’extension
L’accord, courant jusqu’en 2021, prévoit une hausse des salaires, abolit la différence entre employés à temps plein et à temps partiel, et encourage à la formation professionnelle
C’est officiel, la nouvelle Convention collective de travail du secteur du nettoyage en bâtiment a été déclarée de force obligatoire par le Conseil fédéral. Applicable depuis le 1er avril 2018 à l’ensemble des entreprises de nettoyage de Suisse romande, soit plus de 350 entreprises employant 20 000 personnes, elle court jusqu’en 2021.
L’accord prévoit un volet salarial, tout d’abord avec un salaire minimal de 23,05 francs de l’heure (25,05 francs pour Genève), jours fériés, vacances et 13e salaire compris. Les entreprises qui ne respectent pas ces salaires minimaux s’exposent à des amendes et à des rattrapages d’arriérés. Une augmentation progressive des salaires minimaux a également été négociée, à hauteur d’environ 1% par an jusqu’en 2021. Par ailleurs, la classe salariale jusqu’alors réservée uniquement aux salariés œuvrant à temps partiel, qui représente plus de 50% du personnel occupé, a été supprimée. Dorénavant, il n’y aura plus de différence faite entre les salariés à temps plein et à temps partiel. Tous jouiront des mêmes dispositions salariales.
Progresser professionnellement
Les partenaires sociaux, à savoir Unia, Syna et SIT pour les représentants syndicaux et Fren, AGENS et AVEN pour la partie patronale, ont aussi voulu donner davantage de poids à la formation professionnelle. C’est ainsi que la nouvelle CCT offre la possibilité à tous les salariés de suivre cinq jours de formation (au lieu d’un seul) à la Maison romande de la propreté ou à l’Ecole genevoise de la propreté. Elle permet en outre aux travailleurs de fréquenter des filières diplômantes telles que l’Attestation de formation professionnelle (AFP), le Certificat fédéral de capacité (CFC) et la Maîtrise fédérale. «Ce point est important pour donner des perspectives de développement professionnel à chacun, avec de meilleurs salaires à la clé», souligne Aldo Ferrari, vice-président d’Unia.
Renforcer les contrôles
Enfin, le secteur du nettoyage étant en proie à un marché très concurrentiel, employant majoritairement des femmes issues de la migration, les commissions professionnelles paritaires cantonales du nettoyage se sont engagées à renforcer les contrôles et à lutter contre le travail au noir pour assainir le secteur. Les employeurs sont soumis aux contrôles de la CCT, aux contrôles des travailleurs détachés, aux contrôles des travailleurs au noir des différents services de l’emploi, aux contrôles sur site (principalement à Genève), aux contrôles du label Fren «100% pro» depuis 2018, et enfin, aux contrôles des chantiers orchestrés avec d’autres organismes de surveillance récemment instaurés dans les cantons de Vaud, Valais, Genève et en cours de négociation à Fribourg et à Neuchâtel/Jura.
Encore du travail
«Avec les améliorations qu’elle contient, cette nouvelle CCT va dans la bonne direction, assure Aldo Ferrari. Elle représente un jalon important dans la lutte contre la précarité et la sous-enchère salariale.» Il s’agit également de revaloriser une profession toute entière.
Si beaucoup de chemin a été parcouru, Thierry Lambelet, président de la Commission paritaire, dresse pour sa part un bilan mitigé. «Il reste de nombreux autres points à améliorer. Au niveau salarial, nous n’avons pas réussi à conclure cette CCT avec une harmonisation des salaires minimaux entre Genève et les autres cantons romands, alors qu’elle était un objectif dès l’inclusion du canton de Genève dans cette CCT en 2014.» De même, continue Thierry Lambelet, une amélioration du droit aux vacances ou du congé paternité était attendue par le personnel et il y a encore des lacunes au niveau des prestations du 2e pilier, car une grande partie du personnel œuvrant dans le secteur du nettoyage travaille à temps partiel ou pour plusieurs employeurs de la branche simultanément. Par ailleurs, Aldo Ferrari, met en garde face à la numérisation. «Tout comme les conducteurs de taxi et d’autres professions du secteur des services, la branche du nettoyage doit faire face aux défis liés à l’économie des plateformes. Unia et les partenaires sociaux veilleront à ce que le prétexte de la numérisation ne soit pas utilisé pour détériorer les conditions de travail. A ce titre, les déclarations récentes du Seco qui a considéré que le droit du travail doit s’appliquer aux sous-traitants d’Uber vont dans le bon sens.»