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«Notre objectif: une vie digne pour les retraités»

Récolte de signatures pour l'initiative AVSx13.
© DR

Proposition bien accueillie. Près de 60000 signatures ont déjà été recueillies pour l’initiative AVSx13 qui demande le versement d’une 13e rente AVS. Les récoltes se poursuivent, malgré les restrictions sanitaires, comme ici à Renens.

Vice-président d’Unia, Aldo Ferrari revient sur les enjeux de la prévoyance vieillesse présentés par l’Union syndicale suisse. Interview


Face à la situation actuelle de la prévoyance vieillesse, l’Union syndicale suisse appelle à stopper les baisses de rentes et à développer l’AVS. Comment y parvenir?

Il y a deux éléments. D’abord introduire une 13e rente AVS comme le demande notre initiative populaire et ensuite stopper la diminution des pensions dans le 2e pilier en arrêtant de faire porter aux seuls salariés les conséquences de l’abaissement du taux de conversion. Pour cela, un projet a été élaboré par les partenaires sociaux: USS, Travail.Suisse et l’Union patronale. Nous attendons de savoir si le Conseil fédéral, qui devrait rendre son message avant la fin du mois, va faire siennes nos propositions. La situation est urgente. En dix ans, les rentes du 2e pilier n’ont cessé de baisser.

Quelles sont les grandes lignes de ce projet des partenaires sociaux?

Il propose d’améliorer la couverture pour les temps partiels et les femmes ainsi que pour les petits revenus en diminuant de moitié le montant de coordination, soit en le passant de 24885 francs à 12443 francs*. Cela signifie que le salaire assuré sera plus élevé. Dans le même temps, toutes les caisses de pensions seront mises à contribution afin de maintenir les prestations et pour que la baisse du taux de conversion de 6,8% à 6% prévue n’ait pas à être supportée par les personnes aux revenus les plus bas. Ce système passe par l’introduction d’une composante de solidarité entre les caisses, avec une cotisation supplémentaire de 0,5% prise en charge de manière paritaire, par les salariés et les patrons. Autre élément de cette réforme, il n’y aura plus que deux échelons de cotisations: 9% entre 25 et 45 ans et 14% entre 45 et 65 ans. Aujourd’hui, le taux évolue quatre fois entre 25 et 65 ans – 7, 10, 15 et 18% – ce qui renchérit le travail des personnes expérimentées et pose des problèmes sur le marché de l’emploi pour les plus de 55 ans. L’expérience professionnelle n’a pas à coûter en matière de prévoyance. Il faudrait au contraire, dans l’idéal, un taux unique comme pour l’AVS.

Vous dites qu’il est temps de s’adapter aux changements sociétaux qui se profilent. Quels sont-ils?

Notre modèle de société évolue. Notre 2e pilier n’est plus adapté au marché du travail actuel. Davantage de personnes travaillent à temps partiel. Ce n’est pas normal par exemple que, dans un couple où les deux sont à temps partiel, le salaire assuré soit proportionnellement inférieur à celui d’un couple où les deux travaillent à plein temps. Même chose pour les salariés ayant des bas revenus qui, en raison d’un montant de coordination trop élevé, ne cotisent que sur une petite partie de leur salaire. A terme, cela veut dire que leur rente LPP couplée à l’AVS ne suffira pas pour vivre et qu’ils seront contraints de demander des prestations complémentaires (PC). C’est ce transfert des coûts vers les PC que nous voulons éviter, ce basculement entre assurance et assistance. Notre objectif est que les gens vivent leur retraite dignement, sur la base de cotisations paritaires versées durant leurs années de travail.

Vous critiquez la «vision en silos» préconisée par certains. Pouvez-vous préciser?

Ce qui intéresse le Suisse, c’est de savoir combien il touche globalement à la retraite. Le peuple doit décider d’un niveau de prestations. Ensuite, c’est aux partenaires sociaux et aux politiques d’intervenir pour trouver des solutions de financement qui soient paritaires et solidaires dans le 1er comme dans le 2e pilier.

Les médias ont annoncé après votre conférence de presse que l’USS lançait sa campagne contre AVS 21. Un référendum est-il envisagé?

Les chiffres sont parlants. Chaque révision de l’AVS fait porter le coût des économies sur les femmes et il n’en est pas autrement pour celle-ci. En l’état des discussions, la principale solution proposée est la hausse de l’âge de la retraite de ces dernières à 65 ans. Or, le peuple a tranché lors de la votation sur Prévoyance vieillesse 2020. Pour moi, comme vice-président d’Unia, la discussion sur l’âge de la retraite des femmes n’a aucune légitimité démocratique. Les femmes ne travailleront pas jusqu’à 65 ans!

On ne peut pas non plus accepter une révision qui prévoit des baisses de rentes: 50 francs de moins par mois sur une rente AVS de 1185 francs, c’est simplement impensable! Quant à d’éventuelles compensations pour les femmes, je ne vois pas ce que la droite pourrait trouver… Il est clair qu’avec un projet tel qu’il se présente aujourd’hui, le référendum est assuré.

Pour revenir à la 13e rente, cette dernière permettra-t-elle de combler les baisses actuelles?

La 13e rente représente une hausse de 8,3%. Ce n’est pas négligeable. Mais il faut dans le même temps que celles du 2e pilier cessent de diminuer. Ces dix dernières années, elles ont perdu 15% en moyenne et cela entièrement sur le dos des salariés. Pendant ce temps, entre 2005 et 2019, les assureurs ont fait 7,75 milliards de francs de bénéfice sur la gestion des fonds de pensions grâce à la quote-part légale. Il est urgent de trouver des solutions. Les rentes sont soumises à une extrême pression. Nous sommes face à deux défis: l’arrivée des baby-boomers qui touchent l’AVS et la baisse des rendements dans le 2e pilier, les intérêts négatifs affectant près de 40% des avoirs des caisses.

AVS 21 envisage de trouver 26 milliards de francs pour faire face aux déficits prévus, notamment en raison des baby-boomers. L’USS veut mettre à contribution les réserves de la BNS, qui s’élèvent à 84 milliards de francs, pour financer les rentes. Comment y parvenir?

C’est une des sources de financement que nous proposons. Nous sommes en train de discuter de l’opportunité de lancer une initiative populaire à ce sujet.

Voir également: Les femmes, premières victimes d'AVS 21


*Le montant de coordination est déduit du revenu annuel pour déterminer la part du salaire assuré par le 2e pilier. Exemple aujourd’hui: 80000 francs brut de salaire annuel – 24885 = 55115 francs, soumis aux cotisations du 2e pilier. Avec le projet des partenaires sociaux, le salaire assuré serait de 80000 francs – 12443 = 67557 francs, soumis au 2e pilier.

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