Les 41 du défunt «Matin» continuent à lutter pour leurs droits
Colère et ras-le-bol. Défiant la pluie, une trentaine de journalistes licenciés du défunt Matin et des sympathisants ont manifesté jeudi dernier devant la tour Edipresse à Lausanne. But de leur rassemblement: dénoncer l’absence de plan social alors que 200 jours se sont déjà écoulés depuis la mort du titre laissant 41 personnes sur le carreau. Les négociations n’ayant pas abouti, un tribunal arbitral a été constitué. Une séance préliminaire a été programmée en mars. «La direction est restée sourde à nos revendications quand bien même nous les avions revues à la baisse. Nous demandions un plan social basé sur l’âge et l’ancienneté des collaborateurs. Et avons refusé leur offre, insignifiante», déclare Patricia Alcaraz, collaboratrice de Syndicom, précisant que les propositions de Tamedia, des «indemnités-emploi, une spécialité de la Maison», étaient inacceptables. «Les personnes qui n’ont pas encore retrouvé de travail toucheraient un à quatre mois de salaire – mais deux pour la plupart – et devraient renoncer au chômage. Nous voulons de la reconnaissance du travail accompli. Du respect. Des indemnités de départ correctes.» Melina Schröter, qui a travaillé 17 ans comme journaliste pour le quotidien et assumait aussi le rôle de déléguée du personnel, qualifie l’offre d’«humiliante». «Elle implique le maintien d’un lien avec Tamedia alors que nous désirons de notre côté tourner la page.»
Dégoûtée...
L’ex-rédactrice du journal critique aussi la position de l’éditeur sur une aide financière potentielle à la formation. «C’est lui qui décide laquelle serait valable, digne d’un soutien. Du coup, des collègues ont entrepris des formations qu’ils paient de leur poche. Ils ne pouvaient plus patienter.» Et Melina Schröter, interrogée sur son sentiment, de répondre: «Je ressens un immense dégoût. Après toutes ces années passées au Matin... Et je suis loin d’être la plus ancienne. La plupart des employés licenciés comptabilisent des dizaines d’années de service. Ils ont construit toute leur carrière dans ce quotidien. J’ai de la chance d’avoir décroché un nouveau job dans un syndicat. Mais très peu se trouvent dans ma situation.»
Non sans humour, Thierry Brandt, qui occupait le poste de chef d’édition au Matin, a pris la parole et insisté sur les mensonges de Tamedia, prétendument attaché au partenariat social. Et l’homme de citer des extraits de courriers du groupe résonnant comme de la pure langue de bois dans le contexte actuel. Pour illustrer les 200 jours sans plan social, le journaliste les a comparés au vol... du martinet au ventre blanc... qui pourrait rester dans les airs sans atterrir tout ce laps de temps. «Comme Tamedia qui peut, 200 jours, voler les 41 du Matin.» Une situation qui va perdurer, a encore averti l’ex-employé du quotidien: «Nous allons devoir attendre longtemps. En tous cas jusqu’à juin. Mais nos revendications sont légitimes. Nous nous battons pour nos droits.» Un combat plus que nécessaire sachant que l’hécatombe se poursuit avec les récents licenciements dans le secteur prépresse (17 postes supprimés) ou encore à la revue Annabelle – 15 personnes congédiées.