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Stop à la précarisation au Mövenpick!

Action d'Unia avec des employées devant l'hôtel Mövenpick le 8 mars 2020.
© Eric Roset

Le 8 mars, à l’occasion de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes, des employées de l’hôtel Mövenpick à Genève ont dénoncé la précarisation grandissante de leurs conditions de travail.

Les employées, soutenues par Unia, dénoncent des violations systématiques de la convention collective et des dispositions légales. Une résolution demande l’ouverture urgente de négociations

Le 8 mars, à l’occasion de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes, des employées de l’hôtel Mövenpick à Genève ont dénoncé la précarisation grandissante de leurs conditions de travail (lire notre édition précédente). Contrats «extra fixes» ne garantissant aucune heure de travail, déduction des temps de pause même si elles ne sont pas prises, modification des plannings sans consultation du personnel, obligation de se rendre disponible pendant les temps de pause, non-respect des temps de repos ou encore, entre autres choses, surcharge chronique de travail: la coupe est pleine pour les travailleuses! «Loin d’être une solution d’appoint, le recours massif à ce genre de contrats permet à la direction de l’hôtel de répercuter le risque économique, comme dans les cas de baisses de nuitées, sur les employées, engendrant instabilité et précarité», dénonce un communiqué de presse d’Unia.

«On parle surtout des employées du département du housekeeping, à savoir les femmes de chambre et les nettoyeuses, explique Camila Aros, secrétaire syndicale chez Unia responsable du dossier. Mais d’autres départements sont également concernés par les mêmes problèmes, notamment dans les cuisines et les restaurants.»

Résolution déposée

A la suite de cette action, une résolution a été transmise à la direction de l’hôtel cinq étoiles. «Nous avons demandé un rendez-vous urgent, poursuit la syndicaliste. Le département des ressources humaines de l’hôtel a répondu qu’on nous proposerait des dates dans les meilleurs délais.»

La résolution demande notamment l’engagement en fixe des contrats «extra fixes», la mise en conformité du système d’enregistrement du temps de travail avec la compensation ou le paiement des heures supplémentaires, la protection des délégués syndicaux, l’établissement des plannings de travail deux semaines à l’avance pour deux semaines ou encore l’interdiction de faire deux postes à la fois. Soutenues par leur syndicat, les employées se disent prêtes à entreprendre «toute mesure utile pour obtenir leurs demandes».

Privés de salaire

Actualité oblige, Unia exige également que les mesures internes prises par l’hôtel contre le coronavirus soient suspendues. En effet, une circulaire destinée aux employés informe que la direction «interdit à ses collaborateurs de voyager dans une zone à risque», et que si l’interdiction est bravée, ils devront respecter une mise en quarantaine pendant laquelle ils ne pourront pas «prétendre au paiement de leur salaire». Par ailleurs, le document stipule aussi que «l’hôtel décide de la récupération des heures supplémentaires et des congés des collaborateurs». Des mesures tout à fait «illicites» selon Unia. Sans oublier ce personnel «extra fixe», laissé à la maison en cette période de faible activité. «Certaines ne vont pas travailler de la semaine, confie Maria*, une employée licenciée (lire ci-dessous). A la fin du mois, elles auront un salaire de misère...»

«J’ai été licenciée car je ne disais pas oui à tout»

Maria* était employée par l’hôtel Mövenpick comme femme de chambre depuis huit ans avant d’être licenciée au 30 mars prochain. «Au début, tout allait très bien, je travaillais entre 40 et 42 heures par semaine. Et puis, il y a deux ans, je suis tombée enceinte, ma grossesse a été compliquée et j’ai beaucoup été en arrêt.» A son retour, Maria* sent un malaise. «Ma cheffe était sans arrêt contre moi, c’était personnel. Avec trois enfants en bas âge placés en crèche à 60%, j’avais besoin d’un horaire fixe pour m’organiser, et elle n’a jamais voulu se montrer arrangeante ou me libérer aux horaires que je lui demandais. Elle se fâchait tout le temps après moi.» C’est là que Maria* commence à voir baisser ses heures de travail. «Tout à coup, on me demandait de ne travailler plus que deux ou trois jours par semaine. C’est là que j’ai réalisé que j’avais un contrat très bizarre, dit “extra fixeˮ.» Parmi ses collègues, elles sont vingt à être soumises au même contrat, six seulement ont un contrat fixe. «A l’époque, je l’avais accepté, car j’en avais besoin, et on me donnait toujours du travail, donc cela n’avait pas d’importance.» C’est ensuite que ça se gâte. L’hôtel finit par lui proposer du travail sur appel, le jour pour le lendemain. Payée 19,07 francs de l’heure, son salaire oscille entre 1000 et 1500 francs par mois, pas plus. Et elle finit par être remerciée. Elle quittera son poste le 30 mars prochain. «Quand j’ai un problème, je dis les choses et cela n’a pas plu. La direction préfère les employés qui se taisent et font le poing dans leur poche.»

Malgré tout, Maria* a tenu à être présente le 8 mars lors de l’action devant l’hôtel, en solidarité avec ses collègues. «Nous nous battons pour avoir des contrats et des salaires fixes, mais aussi, en tant que mères, pour pouvoir mieux concilier vie professionnelle et vie de famille. Nous demandons également que le temps de change soit compté dans le temps de travail. Enfin, il faut agir sur la charge de travail, qui est exagérée. On doit faire une vingtaine de chambres par jour: on ne peut pas faire de la quantité et de la qualité!» Maria*, originaire de Colombie, pointe un autre problème: «Nous sommes quasiment toutes des femmes venant d’Amérique latine, avec un fort besoin de décrocher un job et un permis. Ces employeurs profitent de notre situation et qu’on dise oui à tout pour nous exploiter. Il faut que cela change!»

*Prénom d’emprunt.

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